Association suisse des organes officiels de contrôle des champignons

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Collaboration avec l'hebdomadaire "Terre & Nature"

L'hebdomadaire "Terre & Nature" a sollicité le groupement romand pour dix publications mensuelles (sauf juillet-août) de courts textes sur des champignons à observer dans la nature. Cinq experts romands ont accepté d’y collaborer.

Ci-joint la première de ces parutions qui seront régulièrement ajoutées à notre site.

L’allume-feu, un champignon tout feu tout flamme

En inaugurant cette rubrique d’observation des champignons, plusieurs options étaient possibles au vu de la rareté des cryptogames en hiver, tout au moins de ceux qui font les délices des gastronomes. On aurait pu vous conseiller d’observer vos réserves de bolets séchés pour éviter l’attaque des mites, ou d’écailleux au vinaigre pour constater un éventuel trouble. Les mycologues, en manque de nature, se réfugient souvent dans leurs livres ou sous l’objectif des microscopes.

Mais revenons à la présence de champignons à cette saison. Tout apprenti champignonneur sait qu’il existe, du point de vue de leur nutrition, des champignons symbiotiques, les plus nombreux (dont en hiver les lichens) vivant en harmonie avec des végétaux et partageant leur repas, des champignons saprophytes se nourrissant de débris organiques, et des champignons parasites s’attaquant aux êtres vivants (mycoses, mildious, etc.).

Le champignon que je vous propose d’observer aujourd’hui est l’amadouvier ou allume-feu. Il s’agit d’un polypore (Fomes fomentarius) parasite de faiblesse (sur des arbres foudroyés ou due aux dégâts de débardage par exemple) puis poursuivant sa croissance en saprophyte sur des troncs tombés ou des souches. Il provoque une pourriture blanche qui détruit le bois. Pour l’observation, l’avantage d’un polypore est sa croissance tout au long de l’année. Il vient principalement sur les hêtres, mais peut s’en prendre à d’autres essences. Sa fructification sessile, qui peut atteindre 40cm de large sur une profondeur de 10 à 20 cm, se présente sous la forme d’un sabot de cheval. La surface du chapeau, pruineuse puis brillante, est marquée de sillons de couleurs différentes correspondant aux périodes de croissance du champignon. Sa chair est dure, compacte comme du bois et donc immangeable. Son intérêt historique réside dans le fait qu’il servait à la préparation de l’amadou ou allume-feu jusqu’au début du XXème siècle. On le préparait en ramollissant la chair de jeunes exemplaires puis en le trempant dans un bain de salpêtre. Dans la région de la Forêt Noire, la production atteignait encore 50 tonnes en 1914. Une autre application fait état des propriétés hémostatiques de l’amadou et il était, pour cette raison, employé comme tel pour soigner les blessures.

Texte : Jean-Martin Ducommun, Boudry

© Photo : Claude Boujon, Genève